Projet Dune-Eole : Focus sur le référentiel de positionnement de formations modulaires

Nathalie Issenmann et Sandrine Monguillon, co-responsables de cette action portée par le Service Universitaire d’Ingénierie et d’Innovation Pédagogique de l’Université de Lorraine dans le cadre du projet Dune-Eole nous en disent plus…

Pouvez-vous définir, en quelques mots, en quoi consiste l’action 2.4 “Focus sur le référentiel de positionnement de formations modulaires”?

NI : La finalité de cette action est de participer au développement de la Formation Tout au Long de la Vie (FTLV) à l’échelle régionale dans le champ du numérique. Il s’agit plus particulièrement de concevoir une offre de formation sectorielle et modulaire, construite sous forme de blocs de compétences. L’objectif est de la rendre accessible, compréhensible et visible pour nos publics cibles, aussi bien les étudiants de formation initiale que les adultes en reprise d’études dans le cadre de leur formation professionnelle. L’accessibilité passe bien évidemment par une offre modulaire mais également par des modalités pédagogiques plus ouvertes comme la FAD (Formation A Distance) par exemple.

En quoi ce projet répond aux enjeux actuels du numérique ?

NI: Nous savons que le secteur numérique est porteur d’emplois. Selon l’étude 2018 de l’OPIIEC, il poursuit son dynamisme, portant ainsi les effectifs du secteur à 474 000 salariés avec une croissance sur 8 années consécutives de 6,3%. Au niveau de la région Grand Est, sur la période 2011-2016, les salariés du secteur du numérique représentaient seulement 2,9%, soit deux fois moins que dans les autres régions. On sait par ailleurs que certaines entreprises rencontrent des difficultés de recrutement et que des postes ne sont pas pourvus. On constate notamment une pénurie de développeurs et de consultants progiciels et un nombre insuffisant de diplômés dans les fonctions ou métiers émergents comme data scientist, CDIO analyste en cybersécurité, architecte cloud, pour ne citer que ceux-là. Ajouté à cela, de nombreux métiers sont impactés, de manière générale par le numérique.

La réponse à ce constat est plus vaste que la formation mais elle n’est pas pour autant à négliger. Sans perdre de vue les exigences et les finalités des formations universitaires, il s’agit, par ce projet, de repérer une potentialité de développement de notre offre de formation sur ce champ et de l’adapter en fonction des besoins en compétences du monde socio-économique, entreprises, collectivités, etc.

Les universitaires ont pleinement conscience de leur rôle et des changements à opérer sur l’offre de formation comme l’a souligné Azim Roussanaly, Responsable de la licence Mathématiques et Informatique Appliquée aux Sciences Humaines et Sociales, qui rappelle que « nous avons une obligation d’innovation ! Et nous devons nous adapter aux acteurs du territoire ». Nous espérons par ce projet contribuer, même modestement, à l’accompagnement des mutations sociétales.

SM : Il est à noter également que le projet est en phase avec des réformes structurantes comme la Loi « Liberté de choisir son avenir Professionnel» promulguée le 5 septembre 2018 qui a pour ambition de réformer en profondeur le système de la formation professionnelle et de l’alternance en France. Elle vise à renforcer en particulier l’implication des partenaires socio-économiques dans le développement de l’offre de formation visant une meilleure orientation et insertion de nos étudiants ou encore « l’arrêté de Licence», impactant l’enseignement supérieur, par l’introduction des « blocs de connaissances et de compétences » pour renforcer la lisibilité des parcours, faciliter l’insertion professionnelle et renforcer la qualité des formations.

La lisibilité de notre offre rejoint l’enjeu majeur du financement de la formation professionnelle puisque par le Compte Personnel de Formation, tout individu ayant acquis des droits à la formation, pourra choisir de financer son parcours personnalisé.

NI : Pour aller dans le sens des propos de Sandrine, j’ajouterais que les établissements d’enseignement supérieur représentaient, selon le rapport Germinet de 2015, seulement 3% du marché de la formation continue en France. Le Ministère de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation avait fixé, à cette occasion, l’objectif de développement du chiffre d’affaires à 1,5 milliard d’euros d’ici à 2020.

Et plus concrètement, quels sont les travaux entrepris dans ce projet ?

NI : Issu d’un Programme Investissements Avenir (PIA2) et porté politiquement par notre établissement via un comité de pilotage, l’action 2.4 a été confiée au SU2IP qui la coordonne et la suit pour une fin programmée en janvier 2021. L’action 2.4 est composée de 5 grandes phases, qui, pour certaines, sont simultanées, il s’agit :

  • d’identifier toutes les formations de l’Université de Lorraine dans le champ du numérique (plus de 70),
  • d’impliquer des partenaires du monde socio-économique, contributifs de notre réflexion sur l’analyse des besoins du secteur,
  • d’entreprendre un travail de ré-ingénierie des formations avec les équipes enseignantes engagées dans le projet afin d’aboutir à l’élaboration de blocs de compétences correspondants à environ 1000h de formation,
  • de créer une nouvelle instance stratégique sur le champ du numérique au sein de l’UL. Il s’agit d’un Conseil de Perfectionnement Sectoriel qui vise à maintenir du lien et à impliquer les partenaires socio-économiques disposant d’une vision globale de leurs besoins et d’une capacité à faire de la prospective,
  • dans une phase plus transversale, de valoriser et de communiquer plus fortement sur l’offre de formation « numérique » pour qu’elle rencontre son public cible.

Et où en êtes-vous actuellement ?

SM : Actuellement, l’équipe projet du SU2IP accompagne les 8 composantes de l’Université de Lorraine ayant répondu favorablement à un appel à projet interne, pour travailler à la transformation de leurs maquettes de formations/diplômes.
9 équipes enseignantes (1 licence, 2 licences professionnelles, 5 masters et 1 diplôme d’ingénieur) sont ainsi engagées pour construire une offre de formation modulaire composée de blocs de compétences capitalisables.

Il s’agit d’un accompagnement collectif avec un suivi individuel de chaque équipe. Ainsi des ateliers sont programmés pour faire des points réguliers sur l’avancée du projet et favoriser la transversalité et les collaborations entre les composantes. Des temps de permanence sont fixés pour rencontrer les équipes et les aider à élaborer leur référentiel d’activités, de compétences et d’évaluation.
Ce travail préalable est nécessaire avant d’aboutir à la création des blocs de compétences. Chaque équipe avance ainsi à son rythme mais dans un objectif commun. Je voudrais également souligner la collaboration avec les partenaires socio-économiques. Nous avons, par exemple, fait intervenir deux représentants de SYNTEC Numérique pour nous présenter, sur la base d’un rapport de l’OPIIEC, une étude prospective des métiers du secteur du numérique à l’échelle régionale.

Ces échanges et éclairages permettent d’alimenter la réflexion des équipes enseignantes. D’autres rencontres seront programmées ultérieurement avec d’autres partenaires.

Une fois que les équipes auront construit des blocs de compétences, il s’agira de travailler sur leur accessibilité optimale, pour les salariés en particulier, par la modularisation, c’est-à-dire la mise en œuvre effective des blocs.